François JACOB (17 juin 1920 – 20 avril 2013)
Le biologiste moléculaire François JACOB est décédé le 20 avril 2013.
Les éloges ont été nombreux pour rappeler les travaux qui lui ont valu le prix Nobel de physiologie / Médecine 1965 associé à André Lwoff et Jacques Monod.
The Nobel Prize in Physiology or Medicine 1965 was awarded jointly to François Jacob, André Lwoff and Jacques Monod “for their discoveries concerning genetic control of enzyme and virus synthesis”.
Mais il ne faut pas oublier que cet homme de science, humble et génial, a eu plusieurs vies. Il les raconte très bien dans son autobiographie, La statue intérieure, dont je vous recommande vivement la lecture, en tant que scientifique mais aussi jeune adulte.
Dans cet ouvrage, François JACOB se raconte grâce à une langue belle, ciselée, qui lui permet de se détacher de lui-même. Aucune vantardise, aucune lâcheté de sa part, des faits montrant comment un être humain né après la première guerre mondiale avance au travers de la deuxième guerre mondiale (combattant !) puis lorsqu’il découvre la génétique.
Ses lignes sur le travail en laboratoire sont enthousiasmantes et pleines de vivacité … tout cela avec une écriture simple, efficace, riche. Parfait !
Deux exemples :
La neige s’était mise à tomber sur le Luxembourg. La lumière baissait, prenait des teintes blanc sale, puis gris sombre. Comme si on repliait le jour pour le ranger dans sa boîte. Pour laisser place à la nuit, à la hantise, aux rêves, aux terreurs. Quand je suis sorti du jardin, l’idée m’est brusquement venue d’une expérience à faire sur la division cellulaire. Une expérience assez simple. Il suffisait de …
Quel extraordinaire matériel que ce bactériophage ! Quelle rapidité de manœuvre il permettait! Le matin, mise en route des cultures, préparation des milieux. Après le déjeuner, sitôt le laboratoire libéré, exécution de l’expérience proprement dite.
Le lendemain matin, lecture des résultats.
C’était là l’instant le plus excitant. Aussi excitant que d’écouter la radio en temps de crise ou voir la fin d’un film policier. Chaque matin, en m’éveillant, je savais qu’il allait se passer quelque chose. Chaque matin, je me précipitais au laboratoire récolter les renseignements que m’apportaient les cultures de la nuit.
A peine les résultats collationnés, il s’agissait d’en tirer les conséquences, de préparer la suite des opérations. Ce qui, le plus souvent, se passait sur la place publique, c’est-à-dire dans le couloir.
Le couloir était en effet le passage obligé, le lieu de rencontre général. L’agora.
Chacun y venait prendre un produit dans une armoire. Ou montrer un article qui venait de paraître. Raconter ses malheurs ou ses réussites. S’enquérir des résultats des autres. Chercher un conseil ou une formule chimique. Discuter d’une théorie. Ou tout simplement bavarder. A peine obtenus, les résultats d’une expérience se trouvaient aussitôt livrés à la foule du couloir. Là, ils étaient disséqués, découpés, hachés, mis en pièces par l’un ou par l’autre.
Si l’expérience résistait à la critique, c’était preuve de sa solidité.
On pouvait alors passer à la suivante. Établir un protocole, le mettre en œuvre sitôt achevé le déjeuner. Se préparer ainsi des gâteries pour l’avenir, une matinée excitante pour le lendemain, avec une nouvelle moisson de résultats. Peu à peu, je m’intoxiquais. Faire des expériences devenait comme une manie, une drogue dont je ne pouvais plus me passer.
Les ouvrages plus scientifiques, mais lisibles sans problème vu vos connaissances, valent aussi très nettement le détour. L’intelligence du propos et la simplicité d’écriture forcent le respect.
Un très bon entraînement pour l’épreuve de Français / Philosophie et le rapport de TIPE !
